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Si moi j'ai le plus beau compliment à faire à un chanteur, c'est ça: il a sa signature. Tu l'entends chanter, t'as pas besoin de connaître la chanson, c'est Daniel Lavoie.

Bruno Pelletier

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Là où la route a mené Daniel Lavoie

Daniel Lavoie monte sur la scène du Théâtre Maisonneuve ce jeudi dans le cadre de Montréal en lumière.

image 1
28 février 2017

La première du spectacle del’album Mes longs voyages, c’est ce jeudi au théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, dans le cadre de Montréal en lumière. Sa combientième rentrée montréalaise, au juste? Il ne sait pas. Moi non plus. Ça en fait plusieurs, on est d’accord là-dessus. «Un pas pire spectacle», évalue Daniel Lavoie à son bout du fil. On a encore des téléphones avec des fils. « En première partie, je fais Mes longs voyages quasiment au complet. L’album pas mal tel qu’il est. Et en deuxième partie, je reprends toutes mes vieilles affaires…»
 
Ça ne s’entend peut-être pas dans le ton, mais l’homme est ravi. «J’y suis allé de reculons», raconte-t-il, comme pour dénoncer l’ironie du petit rire qui le saisit. «Je sortais fatigué de mes trois mois de Notre Dame de Paris [il a repris le rôle de Frollo à l’automne, en France]. Je cherchais l’énergie. Et ce sont les musiciens qui me l’ont donnée. Chez Spectra, ils ont accepté que j’aie des cuivres. J’ai aussi retrouvé mes vieux complices. Ça me fait un gros band…» Il lâche finalement les mots qui vont avec son ravissement: «On a fait deux shows jusqu’ici, les gens embarquent. Ça se passe incroyablement bien. Je m’amuse comme un petit fou…»
 
Sans point d’exclamation, notez. Il y a une pointe de fatalisme dans la voix. Même le plus vif enthousiasme s’exprime avec un petit monticule de grains de sel. Oui, ça tient au fait qu’il revient de loin, Daniel Lavoie, qu’une infection pulmonaire a bien failli l’emporter. Que Mes longs voyages est par conséquent «une sorte de bilan» et pourrait bien être «le dernier album, à une époque où un album est presque devenu une chose du passé…» Ça le fait rigoler, de s’entendre ainsi conjugué. «J’ai rien à prouver, disons, après pas loin de cinq décennies de ce qu’il faut bien appeler une carrière. Mais ce n’est pas un album de fin. C’est vrai que c’est un album empreint d’une certaine sérénité par rapport à la mort, pour l’avoir côtoyée. Je me suis rendu compte que la mort, c’était pas aussi énervant qu’on pense. Alors, à travers le disque, je pense qu’il y a une acceptation joyeuse. J’ai essayé d’y laisser un grand sourire malgré la finalité de la chose. Ça ne rocke pas, mais ce n’est pas lourd. Du moins, j’espère.»

Sans point d’exclamation, notez. Il y a une pointe de fatalisme dans la voix. Même le plus vif enthousiasme s’exprime avec un petit monticule de grains de sel. Oui, ça tient au fait qu’il revient de loin, Daniel Lavoie, qu’une infection pulmonaire a bien failli l’emporter. Que Mes longs voyages est par conséquent «une sorte de bilan» et pourrait bien être «le dernier album, à une époque où un album est presque devenu une chose du passé…» Ça le fait rigoler, de s’entendre ainsi conjugué. «J’ai rien à prouver, disons, après pas loin de cinq décennies de ce qu’il faut bien appeler une carrière. Mais ce n’est pas un album de fin. C’est vrai que c’est un album empreint d’une certaine sérénité par rapport à la mort, pour l’avoir côtoyée. Je me suis rendu compte que la mort, c’était pas aussi énervant qu’on pense. Alors, à travers le disque, je pense qu’il y a une acceptation joyeuse. J’ai essayé d’y laisser un grand sourire malgré la finalité de la chose. Ça ne rocke pas, mais ce n’est pas lourd. Du moins, j’espère.»

La tranquille trame d’une vie
 
Je l’ai écrit en septembre dans ma recension, au moment de la sortie: «Tout ça compose, non pas un testament, mais un supplément d’âme, la trame d’une vie.» Il y a un peu tout Lavoie, dans ce disque. On est là où la vie l’a mené, pour paraphraser le titre de la chanson phare de son répertoire, qui est aussi le titre du coffret-compilation de 1996: Où la route mène. Lavoie y décrit des instants d’éternité de l’enfance (Ceci est moi), s’y regarde implacablement (Qui es-tu je seul), y évoque sa mère qui perd la mémoire (Maman chantait les feuilles), y collabore avec Jeff Moran et Patrice Guirao, y interprète les chansons de ses préférés (Félix, Ferré, Bashung, Allain Leprest), offre une ballade jazzy cool au grand Chet (Baker): on peut dire qu’il fait le tour de son jardin d’hiver. «J’ai beaucoup, beaucoup voyagé dans ce foutu métier. Et c’est bien où j’en suis rendu.»
 
De Ferré, il chante… Avec le temps. Immortelle piégée par excellence: on a eu tant de versions. «Je le sais, mais je m’en foutais. C’est une chanson qui m’a profondément marqué quand j’avais 18-19 ans. Je me souviens de l’avoir entendue à Saint-Boniface, avec mes chums là-bas, au Manitoba, on se rencontrait le vendredi soir pour écouter de la musique. J’avais été complètement scié. J’ai toujours eu envie de la chanter, et j’ai toujours eu l’impression que j’étais ben trop jeune. Cette année, je me suis dit: c’est maintenant ou jamais.»
 
Ça aussi, c’est ce qu’on se dit quand on a cette conscience accrue du fait que «la vie peut basculer du jour au lendemain, que t’es juste un amas de chair qui espère…» Encore une fois, le propos le fait pouffer dans mon oreille gauche. «Parlons plutôt de la chanson de Félix, suggère-t-il. C’est sa moins connue, mais c’est celle où il se livre le plus, et c’est magnifique.» D’accord. Extrait de Mes longs voyages, chanson-titre de l’album et du spectacle: 

«Maintenant je suis là
Si demain je m’en vas, retiens-moi
Rejoins-moi, si je meurs
Et nous irons vivre ailleurs».

http://www.ledevoir.com/culture/musique/492758/itw-daniel-lavoie